Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/122

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Tom cacha sa tête dans ses oreillers et murmura lamentablement :

— Hélas ! Ce n’était point un rêve ! Allez, messire, reprenez votre repos et laissez-moi mes soucis.

Tom ferma les yeux et se rendormit. Bientôt il rêva qu’on était en été et qu’il jouait tout seul dans une belle prairie appelée le Champ du brave homme, lorsqu’un nain d’un pied de haut, avec de grands favoris rouges et le dos tout voûté, se montra soudainement à lui, et lui dit : « Creuse un trou au pied de cet arbre ». Il obéit et trouva douze pennies tout luisants neufs, un vrai trésor ! Mais ce n’était pas tout. Le nain ajouta : « Je te connais, tu es un bon enfant, et tu mérites qu’on s’intéresse à toi. Tes maux vont cesser, car le jour de la récompense est arrivé. Tu viendras creuser un trou ici tous les huit jours, et tu y trouveras chaque fois le même trésor, douze pennies, tout beaux, tout neufs. Ne le dis à personne. Garde bien ce secret. »

Le nain disparut ; et Tom courut à Offal Court en se disant : « Tous les soirs je donnerai un penny à mon père, il croira que je l’ai reçu en aumône, il sera content, et il ne me battra plus. Un penny toutes les semaines au bon prêtre qui me donne des leçons ; les autres pour ma mère, pour Nan et Bet. Plus de faim, plus de guenilles, plus de coups, plus de craintes. »

Dans son rêve, il arrivait chez lui hors d’haleine ; il se précipitait dans son sordide galetas ; ses yeux flamboyaient d’enthousiasme ; il jetait tous ses pennies sur les genoux de sa mère, et il s’écriait :

— Tout pour toi, tout ; pour toi et pour Nan et pour Bet ; je les ai gagnés honnêtement ; je ne les ai pas mendiés, ni volés.