Page:Twain - Le prince et le pauvre, trad Largilière, 1883.djvu/22

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baguenaudant une route tranquille et charmante, passa devant le palais somptueux du grand cardinal, et se dirigea vers un autre palais beaucoup plus important, plus majestueux, qui se trouvait au delà, et qui était Westminster. Tom contempla, avec des yeux émerveillés, cette masse énorme de maçonnerie aux ailes éployées, les bastions sourcilleux, les tours menaçantes, la large porte de pierre avec sa grille dorée, ses superbes lions, colosses de granit, et tous les signes et symboles de la puissance. Le rêve qu’il avait si longtemps caressé allait-il enfin se réaliser ? C’était bien là, en effet, le palais d’un roi ; mais lui serait-il donné d’y voir un prince, un prince en chair et en os ? Ah ! si le ciel pouvait exaucer ce vœu !

De chaque côté de la grille d’entrée se dressait une statue vivante, c’est-à-dire un homme d’armes, raide, immobile, couvert de la tête aux pieds d’une armure d’acier resplendissante. À une distance respectueuse étaient attroupés des gens de la campagne ou de la Cité, attendant une occasion pour saisir au passage quelque manifestation de la grandeur royale. De splendides carrosses, à l’intérieur desquels se prélassaient de splendides personnages, tandis qu’au dehors se perchaient des laquais non moins splendides, entraient et sortaient par d’autres portes pratiquées dans le mur d’enceinte.

Le pauvre Tom en haillons se rapprocha à pas de loup et passa timidement devant les sentinelles. Son cœur battait à rompre sa poitrine, mais une secrète espérance remontait son courage. Tout à coup il aperçut à travers la grille dorée un spectacle qui faillit lui arracher un cri de joie. Dans la cour du palais se tenait un jeune garçon de son âge, au