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UNE VIE BIEN REMPLIE

qui les avait élevés avec l’amour d’une mère ; la veille de sa mort, elle lui demanda de lui jouer sur son violon « la noce bretonne » ; son père l’en pria, disant que l’on ne pouvait refuser cela à une mourante ; il n’a pas voulu. Trois ans plus tard, son père, lui rappelant ce fait, lui disait : mon pauvre enfant, tu dois avoir regret de cela aujourd’hui. Il répondit : Mais pas du tout ! (Je crois qu’il y a une part d’atavisme dans le cas de ces deux enfants.)

Si ce sont les romans de notre époque qui engendrent de pareilles idées, cette littérature est bonne à mettre au fumier et la remplacer par la littérature saine, dont vous parlez pour les écoles primaires et secondaires.

Pour ce qui est du dépeuplement des campagnes, on ne pourra pas l’arrêter tout à fait, mais je crois que l’idée qu’a émise monsieur le Maire tout à l’heure est capable de l’enrayer fortement ; oui, si chaque année on organisait des voyages de plaisir pour hommes et femmes sous la conduite d’un guide connaissant bien Paris, ils pourraient, en quelques jours, voir, s’instruire ; le guide montrerait que la grande ville n’est le plus souvent que mirage et, plus instruit de la vie de Paris, on aimerait à y venir en touriste pour s’y promener et non pour y rester.

Pour toutes les autres questions, je suis également de votre avis pour l’école laïque exclusivement ; pour la paix contre la guerre, pour la liberté de conscience, tout en étant athée, et pour le beau rêve humain, la fraternité parmi les hommes, par le communisme et non par le partage, ainsi que des intéressés ou des ignorants le disent encore.

Madame Billon dit : Voulez-vous me permettre de dire quelques mots ? Je ne suis pas tout à fait ignorante de ces questions ; avant de me marier j’étais institutrice en exercice ; de plus, il arrive souvent qu’après les séances officielles, ces messieurs du Conseil s’en donnent à cœur-joie et, de mon coin, je les écoute en reprisant mes bas ; ils sont tous plus ou moins républicains, à coup sûr de bonne foi.

Pour l’instruction primaire, je la veux enseignée par l’État ; cela supprimera les haines entre enfants et familles ; je veux les éducateurs mieux payés ; je veux aussi que les maires soient rétribués selon le travail qu’ils font ; je ne vais pas avec ceux qui prêchent la grève des conscrits,