Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/192

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les épigrammes de Cristodore de Coptos sur les statues du Zeuxippe, enfin tant de pièces descriptives, qui forment une des parties les plus riches de l’Anthologie grecque. L’ecphrasis ainsi affranchie pénétra dans l’école ; Hermogène et quelques rhéteurs la distinguaient des autres exercices[1] ; d’autres la comprenaient dans celui qui consistait à raconter des fables. Au quatrième siècle de l’ère chrétienne, après les succès des Philostrate, et autres écrivains dans l’ecphrasis, cet exercice paraît avoir pris dans les classes une grande importance ; on trouve par exemple, dans le traité du rhéteur Nicolaos, plusieurs descriptions que le maître avait composées d’après des œuvres d’art feintes ou réelles et qui devaient servir de modèles aux jeunes gens[2].

Pour nous autres modernes, l’ecphrasis, unie à un autre genre, nous parait un ornement souvent équivoque ; et quand elle est seule, un genre inférieur. Tout autre semble avoir été le sentiment des anciens. Décrire une œuvre d’art, c’est lutter avec un artiste, et ils ne paraissent pas avoir douté que la parole ne fût capable d’entreprendre et de soutenir cette lutte. On reconnaît, dit Elien[3], que la parole, douée d’éloquence, n’est pas plus impuissante à montrer les objets que les hommes habiles dans la main-d’œuvre. Himérius va plus loin. « Tout ce que peuvent les peintres, dit-il, le discours le peut aussi ;

    faites à limitation de Philostrate l’Ancien ; l’auteur emprunte souvent ses expressions, ses tournures, ses transitions, à notre sophiste. Les compositions décrites sont un peu compliquées ; les personnages sont multipliés à l’infini ; le premier rôle y est donné à l’expression ; le second à l’ingéniosité de l’idée, le troisième à la perfection de l’exécution, tout cela un peu comme chez Philostrate ; M. Eugénicus décrit quelquefois avec force et un grand air de vérité les expressions, par exemple, dans ce premier tableau de Démétrios martyr ; il analyse les expressions mêlées avec finesse et sans trop de subtilité ; c’est là d’ailleurs l’écueil et le triomphe de la critique d’art : les descriptions de M. Eugénicus ont été publiées en 1840 par Kayser, à la suite de quelques fragments du traité de Philostrate sur la gymnastique.

  1. Herm. προγυμνάσματα, c. X. Toutefois Hermogène ne parle pas particulièrement des descriptions de tableaux. Il y a, dit-il, des ecphraseis de visages, d’actions, de situations, de temps et de beaucoup d’autres choses.
  2. Rhetores Græci, édit. Walz, I, p. 394.
  3. Elien, V. H., III, 1.