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LIVRE I.


252 PHILOSTRATE L’ANCIE

une place aux Gelées dans la composition, et cependant il eût pu le faire avec le mème droit. Si l’Heure de midi eût été représentée, Philostrate n’eût-il pas dit que la Nuit chassait celte heure, et non qu’en plein midi la Nuit chassait le jour ? Wieseler cite un passage de Polybe d’après lequel l’Heure de midi (1), pérsonnifiée, figurait dans la pompe du roi Antiochus ; mais ce n’est point là un motif pour faire violence au texte de notre auteur. Dans un bas-relief de Rome qui a pour sujet la chute de Phaéthon (2), une figure de femme, aux ailes déployées, au torse nu, semble s’envoler loin du char et des chevaux ; Wieseler lui donne le nom de Mésembria, l’Heure de midi, mais c’est une pure conjecture, qui fàt-elle vraie, ne saurait prouver que Mésembria jouait un rôle dans le tableau de Philostrate. Phosphoros, l’étoile du matin, Hespé- ros, l’étoile du soir, se montrent quelquefois dans ces sortes de composi- tions, sous les traits d’enfants ailés qui portent des torches (3), mais Philo- strate, en disant que le globe du soleil, précipité sur la terre, entraîne avec lui les astres, ne fait guère songer à une personnification. Les étoiles, qui apparaissent quand le soleil descend avec rapidité semblent comme amenées sur la voûle céleste, par ce mouvement même : ainsi dans Homère le soleil se couchant dans les flots de l’Océan tire derrière lui le voile de la nuit noire sur la terre fertile (4) ; de même dans Euripide le soleil entraîne la brillante lumière d’Hespéros. Ce sont là, ce nous semble, des expressions poétiques, qui n’ont rien de conforme à la vérité scientifique, mais qui rendent compte de la succession et de l’ordre apparent des phénomènes célestes. On aurait tort de croire que ces mots d’attirer, d’entraîner ne peuvent s’appliquer qu’à des personnes ou des personnifications. Quant à la Nuit, Wieseler en conteste la représentation allégorique, avec beaucoup plus de raison qu’il ne suppose ce cortège de personnages fabuleux. Le texte de Philostrate, en effet, laisse à peu près le champ libre à l’interprétation.

Examinons maintenant le tableau de Philostrate détail par détail. La Nuit chasse le jour, dit l’auteur, et derrière le globe du soleil paraissent les astres. Comment se représenter ce globe du soleil qui se précipite sur la terre ? Le soleil n’est-il pas le char lui-même que conduisait Phaéthon et qui doit tom- ber avec lui ? mais alors un char n’est point un globe, ne présente pas la forme d’un disque, et l’expression de Philostrate reste au moins singulière. Faut-il penser avec Welcker que Phaëthon ou les chevaux ont la tête entourée d’un diadème de rayons qui ne les abandonne pas dans leur chute ? mais outre que sur les monuments Phaéthon ne porte point cette espèce de cou- ronne, que les chevaux du soleil n’en sont jamais parés, on comprendrait mal l’expression de Philostrate appliquée à une et surtout à plusieurs têles



(1) Phaeth., p. 21 ; Polyb., XXXI, 3.

(2) Phaeth., pl. n° 4.

(3) Mañoi, Museo Véron, t.

(4) 1 6, 485 Ev d’éren’’Over Eurip. Jon 1149 : "Htos Epéxev dau

I, n° 1 ; Wicscler, Phaeth., pl. n° 2. à ou Ebay vuvea péravay rt Leidwpoy povsav.