Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/323

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que le peintre ait voulu le montrer plutôt au moment de jouer que jouant déjà[1].

Philostrate a donc bien pu voir Olympos, tel qu’il nous le décrit ; ce n’est pas que nous approuvions ou que nous trouvions parfaitement intelligibles tous les traits de sa description. À quoi, par exemple, Philostrate juge-t-il que la poitrine d’Olympos n’est point seulement emplie par le souffle qu’il en tire, mais encore par l’inspiration musicale, par la science des modulations ? Le rhéteur est évidemment la dupe de son imagination ou cherche à imposer au lecteur ; il n’y a pas de signe sensible dans l’art pour de telles idées ; une poitrine, si bien peinte qu’elle soit, ne saurait être aussi éloquente. Jacobs adresse un autre reproche à Philostrate ; il s’étonne que les objets réfléchis dans l’eau puissent se déformer, se ramasser sur eux-mêmes, et se demande pour quelle cause Philostrate a été amené à cette remarque singulière. L’observation du rhéteur ne manque pas cependant de justesse. Dans la nature, l’image réfléchie d’un personnage debout sur la rive d’un ruisseau égale, il est vrai, ce personnage en hauteur ; mais si notre point de vue se trouve placé à la hauteur de sa tête, nous verrons l’image réfléchie sous un angle beaucoup plus petit que l’objet lui-même, et par conséquent cette image, quoique identique à l’objet nous semblera plus petite. Or, le peintre qui représente les apparences plutôt que les réalités, aurait évidemment montré l’image d’Olympos en raccourci, s’il avait représenté debout Olympos lui-même. Le graveur qui a sculpté les planches pour la traduction de Blaise de Vigenère a mieux compris cet effet de perspective que le texte de Philostrate ; son Olympos est debout contrairement à la description ; mais, conformément à l’observation de l’auteur grec, l’image vue dans l’eau est altérée dans ses proportions et paraît même se ramasser sur elle-même. Philostrate cependant se trompe sur un point : ce ne sont point seulement les parties inférieures de la poitrine qui dans ce cas paraissent se déformer, c’est le corps tout entier.



XXI

Midas.


Le satyre dort, parlons de lui à voix basse, de peur qu’il ne s’éveille et que le tableau ne s’évanouisse comme un fantôme. Midas l’a pris en Phrygie au pied de ces montagnes que tu vois : le roi avait mêlé du vin à l’eau de cette source, au bord de laquelle le satyre, encore étendu, vomit des flots de vin pendant son sommeil. Les satyres nous plaisent par leur vivacité, quand ils dansent, par leur gaieté bouffonne, quand ils sourient amoureusement, les dignes personnages, et que par leurs adroites caresses ils réduisent à leur merci les femmes lydiennes. Voici

  1. Antiq. d’Herc., V. 3, 101. — Roux, Herc. et Pomp., II, 14.