Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/431

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sant les pieds sur les vagues, debout entre un hippocampe et un dragon marin[1], tantôt n’élevant au-dessus des flots que la partie supérieure du corps[2], et ressemblant assez au Neptune de Virgile qu’on a tort de citer quelquefois comme un exemple de l’impuissance de l’art à reproduire certaines images poéliques :

Prospiciens summa placidum caput extulet alto
Prospiciens summa placidum caput extulit unda
[3].

Suivant Philostrate, Poseidon avait les cheveux hérissés. La chevelure de Poseidon, sur les monuments figurés, change d’aspect, suivant que l’artiste a voulu représenter le dieu qui apaise ou soulève les flots, le dieu qui contemple ou parcourt son domaine, le dieu au repos ou agissant : tantôt ses cheveux retombent mollement des deux côtés, encadrant une figure paisible[4], tantôt ils sont comme humides et ruisselants[5] ; tantôt ils frisent, ils ondulent sur le front au-dessous d’un bandeau, et semblent agités par la violence des vents[6] ; tantôt ils se dressent sur le sommet de la tête[7], et le dieu ressemble alors de très près à celui que nous décrit Philostrate.

Le dieu tient aussi son trident de différentes manières, suivant les circonstances ; tantôt il s’appuie sur son trident, aux pointes tournées en haut, comme ferait un guerrier sur sa lance[8] : c’est Poseidon au repos ; tantôt il le tient comme un sceptre[9] : c’est Poseidon, souverain des mers ; tantôt les pointes du trident sont tournées vers la surface de la terre ou de la mer : c’est le dieu qui a cessé de menacer ou de commander, qui contemple en silence l’effet de ses ordres ou de sa victoire, ou bien encore c’est le dieu qui explore le sol pour en faire jaillir des sources[10] ; tantôt enfin, et c’était sans doute le cas dans le tableau décrit par Philostrate, il tient le trident à la hauteur des yeux et s’apprête à le lancer contre un obstacle qui cèdera à la violence du choc[11].



XIV

La Thessalie.


Au premier regard jeté sur cette peinture, on croit voir l’Égypte,

  1. Par exemple, sur un bas-relief du Musée du Vatican, Müll.-Wies., II, 17a ; Overbeck, Kunstm., Atlas, XII.
  2. Millia, Gal. myth., pl. CLXII ; Müll.-Wies., II, 69a.
  3. Virg., Æn., I, 126.
  4. Statuette de Dresde, Becker, Augusteum, taf. 40. — Overb., Kunstm., atl. XII, 32. Müll.-Wies., II, 70.
  5. Cohen, Méd. cons., pl. XXXII, Plautia no 4, Müll.-Wies., II, no 68d.
  6. Monnaies en bronze du Bruttium, Müll.-Wies., II, 68b.
  7. Overb. Kunstm., Atl. taf. nos 11 et 12. Voir aussi les planches jointes au texte, Poseidon, Taf. II, nos 1 et 2, III, 1.
  8. Overb., Kunstm, Atl. taf. XII. — Müll.-Wies. II, taf. VI et VII. Voir aussi Bronzes antiq. du Louvre, no 248.
  9. Méd. d’Adrien, Müll.-Wies., II, VI, 72.
  10. Voir dans Müll.-Wies., II, taf. VI, les nos 71b, 70d, 74b.
  11. Revers d’une monnaie en bronze de Posidonia, Fiorelli, Mon. inéd. d. citt. Gr., II, 7. Müller-Wies., II, 74a.