Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/446

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cette grotte. Il faut donc, croyons-nous, modifier ainsi l'ordonnance propo- sée par Welcker pour une partie du tableau : point de temple de Poseidon ; un téménos, c'est-à-dire un bois de pin, s'étendant jusqu'au rivage, et formant une espèce d'enceinte, au milieu de laquelle Sisyphe entouré de son peuple, sacrifiait un taureau noir à Poseidon.

Poseidon et les figures allégoriques composaient, comme nous l'avons dit, un groupe qui faisait pendant au groupe des personnages réunis dans le bois de pin. On ne doit pas s'étonner, avec un critique, que les figures allégo- riques soient nombreuses : les artistes anciens opposent presque toujours des masses égales les unes aux autres : Isthmos, Léchæon, les Cenchrées qu'on peut supposer représentées par deux figures, deux Thalattai, n'étaient pas trop nombreux pour faire équilibre à tout un peuple, c'est-à-dire sans doute à cinq ou six personnages qui représentaient le peuple de Corinthe (1). Poseidon, le dieu des mers, était d'un côté le personnage principal comme Sisyphe, le roi de l'Isthme l'était de l’autre. Si on place Sisyphe à l'extrémité gauche du tableau, il en résulte que Poseidon devait être la dernière figure à droite ; si le roi de Corinthe occupait le centre de la composilion, Poseidon devait être près de lui, le visage tourné vers les figures allégoriques et par conséquent tournant le dos à Sisyphe. De quelque façon que l’on entende l'or- donnance de ce tableau, les deux scènes étaient bien distinctes; l'attitude symétrique et opposée des personnages montrait qu'ils ne se mêlaient pas les uns aux autres.

Dans le second groupe, le personnage principal après Poseidon était Isthmos. Poseidon placé en face de lui semblait lui parler. De là l'explication ingénieuse de Philostrate, motivée d’ailleurspeut-être par le geste d'Isthmos : « Poseidon lui ordonne de déployer sa poitrine, c’est-à-dire sans doute d'ouvrir les bras, pour recevoir Mélicerte. Isthmos avait à sa droite le Léchæon, à sa gauche les Cenchrées; mais les Thalallai n'étaient probablement pas si voisines de lu c’est pour ce motif sans doute que Philostraste dit d'elles, non pas qu'elles sont assises près d'Isthmos mais près de la terre où Isthmos était représenté ; elles étaient sans doute au nombre de deux, l’une pour la mer Egée, l'autre




(1) C'est à tort, sclon nous, que Brunn, trop frappé de l'objection de Friederichs, cherche à réduire le nombre des figures. Nous croyons cependant devoir donner les raisons de cet habil archéologue : « Philostrate, dit-il, après avoir mentionné Léchæon et Cenchrea ajoute : voici des mers (farrx) bolles et suffisamment calmes ; il faut entendre par ces mers, non des personnifications de la mer Égée et de la mer Adriatique, mais la représentation même de la partie de mer renfermée dans les deux bassins ou les deux ports, le Léchæon et le Cenchrea. L'idée de calme profond s'accorde bien avec cette conjecture. D'ailleurs le mot de Keyygetai ne se trouve pas dans tous les manvserits; d'autres donnent xégx, jeunes filles, et ce mot s'appliquerait à des figures représentant les mers Egée et Adriatique. Les figures représentant 1e port de Cenchrée seraient ainsi supprimées. Enfin, si l'on veut maintenir Keyypeszi, il ne s'en suit pas que le port de Cenchrée, désigné en grec parun pluriel, fût représenté dans le tableau par plusieurs figures. Dans une des peintures du mont Esquilin, un seul personnage représente les Axra ou rivages. Millingen a cru reconnaitre les ports personnifiés de Léchæon et dé Cenchrée sur une médaille (Sylloge of ancient uned. coins., M, 30, 56). Il n'y a que deux personnages. »