Page:Une galerie antique de soixante-quatre tableaux (Philostrate de Lemnos, trad. A. Bougot).pdf/472

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de constellations placées dans le ciel et peintes, dit-il, au milieu de l’éther. Nous croyons que l’artiste n’avait représenté du globe céleste qu’un segment de cercle, embrassant toute la partie supérieure du tableau ; ainsi il échappait à l’inconvénient d’avoir à représenter dans les airs autre chose que le ciel et donnait au spectateur la sensation d’une masse énorme pesant sur le dos du Titan. C’est ainsi que le sujet paraît avoir été conçu sur un miroir étrusque de Vulci[1] : Héraclès qui tient les pommes des Hespérides s’éloigne d’Atlas ; celui-ci soutient de ses mains la voûte étoilée représentée seulement par une partie de sphère qui dessine avec la circonférence du miroir une espèce d’ovale irrégulier. Sur le vase d’Archémoros[2], dont un côté représente Héraclès au jardin des Hespérides, Atlas, dans la partie supérieure de la peinture, soutient la voûte étoilée dont on n’aperçoit qu’une faible portion. L’artiste, il est vrai, a représenté en dehors de cette voûte étoilée, Eosphoros monté sur un cheval, Hélios porté sur un bige, de sorte que le ciel et Lucifer ne se trouvent pas faire partie du globe céleste. On pourrait à la rigueur imaginer une disposition semblable pour le tableau de Philostrate : le ciel dont parle le sophiste serait la voûte étoilée ; l’éther dont il fait mention comme enveloppant les constellations[3], aurait été un autre espace céleste avec d’autres signes, d’autres figures ; par exemple, le taureau avait été représenté comme une constellation dans l’air, et comme un taureau véritable sur le globe ou fragment de globe, porté par Atlas ; ici les ourses auraient figuré sous forme d’animaux ; là, comme groupe d’étoiles ; enfin c’est dans le champ libre de l’air que les vents eussent été personnifiés[4]. Toutefois nous n’oserions trop insister sur une pareille conjecture ; la part de la convention, très grande dans tout l’art antique, l’est surtout dans la peinture de vase, et ce serait une erreur que d’attribuer toutes les hardiesses de cette dernière à la peinture, si hardie qu’elle soit, de mur ou de chevalet.



XXI

Antée.


Un nuage de poussière, comme dans les luttes qui ont lieu près de la source d’huile, deux athlètes dont l’un couvre son oreille de l’amphotide, l’autre détache de ses épaule une peau de lion, des tertres funè-

  1. Micali, Monum. pour serv. etc., pl. XXXVI, 3. Gerhard, Etrusk. Spieg., II, pl. CXXXVII.
  2. Guigniaut, N. Gal. myth., pl. CCVII, no 665b.
  3. Voici en effet la traduction littérale de ce passage de Philostrate : « les choses (qui sont) dans le ciel sont représentées dans l’éther (représenté lui-même) tel qu’il se tient autour d’elles. » Nous lisons αὐτά ; le sens nous paraît le même qu’avec le mot ἀστέρας que propose Brunn. Brunn toutefois peut avoir raison, attendu que les manuscrits donnent αὐτάς et non αὐτά.
  4. Sur les différentes représentations d’Atlas portant le globe céleste, voir l’opuscule de Gædekens, Der Marmorne Himmelsglobos. Partout où les signes du Zodiaque sont représentés, ils affectent la forme d’êtres vivants.