Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/429

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fois paroistre de n’avoir point son service desagreable, ce qui le lia si bien, que rien depuis ne l’en a jamais peu distraire. Et c’est sans doute que Galathée avoit bien quelque occasion de favoriser Polemas, car il estoit homme qui meritoit beaucoup. Pour sa race, il est, comme vous sçavez, de cet ancien tige de Surieu, qui en noblesse ne cede pas mesme à Galathée. Quant à ce qui est de sa personne, il est fort aggreable, ayant et le visage et la façon assez capable de donner de l’amour. Sur tout il a beaucoup de sçavoir, faisant honte en cela aux plus sçavans. Mais à qui vay-je racontant toutes ces choses ? Vous les sçavez, mon pere, beaucoup mieux que moy. Tant y a que ces bonnes conditions le rendoient tellement recommandable, que Galathée le daigna bien favoriser plus que tout autre qui pour lors fust à la cour d’Amasis. Toutefois ce fut avec tant de discretion, que personne ne s’en prit jamais garde. Or Polemas, ayant ainsi le vent favorable, vivoit content de soy-mesme, autant qu’une personne fondée sur l’esperance le peut estre.

Mais cest inconstant amour, ou plustost ceste inconstante fortune, qui se plaist au changement, voire qui s’en nourrit, voulut que Polemas, aussi bien que le reste du monde, ressentist quelles sont les playes qui procedent de sa main. Vous pourrez vous ressouvenir, qu’il y a quelque temps qu’Amasis permit à Clidaman de nous donner à toutes des serviteurs. De ceste occasion comme d’un essaim, sont sortis tant d’amours, qu’outre que toute nostre cour en fut peuplée, tout le pais mesme s’en ressentit. Or entr’autres par hazard Lindamor fut à donné à Galathée : il avoit beaucoup de merites, toutesfois elle le receut aussi froidement que la cermonie de ceste feste le luy pouvoit permettre. Mais luy qui peut-estre des-jà auparavant avoit eu