Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/122

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leur avoir rendu leur salut: Maintenant, dit-elle, je ne puis davantage m’arrester aupres de vous, et le temps n’est point encore venu de vous mettre lors de peine, ce sera toutesfois bien tost, contenez-vous de sçavoir que le dieu n’a point oublié ce qu’il vous a [68/69] ordonné par son oracle, et qu’en temps et lieu il l’accomplira. Florice prenant la parole: A cette heure, dit-elle, que nous sçavons à qui les dieux ont remis le soing de nous, nous attendrons avec contentement, autant qu’il leur plaira, vous assurant, sage bergere, que nous demeurons plus satisfaites du choix qu’ils ont fait de vous, que de chose qui nous pust arriver.

Diane, et l’autre estrangere escoutoient curieusement leurs discours, mais n’y entendans rien, Diane demanda à Phillis, de quelle contentement elles parloient: Les dieux, respondit froidement Phillis, ont fait venir ces trois belles estrangeres en cette contrée pour y recevoir quelque remede à la peine en laquelle elles sont, et par un oracle leur ont deffendu d’en parler à personne, qu’à celuy qui leur a respondu l’Oracle; et maintenant, pleine d’un certain esprit inacoustumé, je leur ay dit, et de plus, je les assure, qu’elles en auront toute sorte de satisfaction et de contentement. Si Diane avoit esté estonnée au commencement, elle le fut encore davantage oyant ces paroles, ne se pouvant imaginer comme sa compagne avoit pu sçavoir cet Oracle: mais Phillis, feignant fort bien que ce fust une inspiration, apres quelques