Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/134

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Apres estre demeurées quelque temps en ce plaisant exercice, elles s’acheminerent du costé de la grande allée, parce que l’ombrage y estoit fort espais, et que le petit bras de Lignon qui la suit d’un bout à l’autre rend le lieu plus frais et plus agreable; mais elles ne furent guiere avent dans le bois, qui est à la main gauche, qu’elles apperceurent une grande trouppe de bergers et de bergeres qui s’y promenoient. Cette rencontre troubla un peu nos deux desguisées, parce que n’estans pas encores guieres bien assurées, elles craignoient au commencement d’estre veues de tant de personnes, c’est pourquoy elles prierent Diane et Phillis de vouloir aller vers cette compagnie, cependant que pour n’estre recogneues elles prendroient un autre chemin. Ces deux bonnes amies s’avencerent incontinent pour leur complaire, et retindrent toute la trouppe, qui les ayant veues, s’acheminoit vers elles pour leur donner le bon jour. Et Diane y ayant rencontré Daphnis, comme l’une de ses plus cheres amies, l’alla embrasser, et luy demander comme elle avoit passé la nuict.

Les premieres salutations estans finies, Hylas qui estoit de la trouppe, et Corilas aussi, ne pouvans guieres demeurer ensemble sans disputer de diverses choses, continuerent les discours qu’ils avoient commencez, devant que ces deux bergeres arrivassent: Dis moy, Hylas, je te supplie, reprit Corilas, à ce coup que tu as perdu Alexis pour Stelle, à quel jeu diras-tu que tu l’as jouée? – Pourquoy, respondit Hylas, me fais-tu