Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/146

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par ce que ce chan­gement estait si cognoissable, Astrée et Alexis s’en apperceurent aussi-tost qu’elles la virent. Cela fut cause qu’Alexis luy demanda d’abord si elle se trouvoit mal, à quoy elle répondit que non, et qu’au contraire, elle avoit eu beaucoup de plaisir d’ouyr la dispute de Hylas contre la beauté. Mais, dit-elle, je m’assure qu’il n’aura pas si bon marché de Silvandre qu’il l’a eu de Corilas. – Et comment, reprit Astrée, Silvandre est-il dans la compagnie? – Il y arrivoit, répondit Diane froidement, au mesme temps que j’en suis partie, et j’ay veu que toute la compagnie se preparoit pour l’écouter.

Alors Astrée ensousriant, et se tournant vers Alexis: Ma maistresse, luy dit-elle, ne demandez plus à Diane si elle se trouve mal, je sçay bien d’où vient le changement que nous avons remarqué en son visage. – C’est, adjousta Diane, parce que je me suis hastée de vous venir trouver, et que depuis quelque temps je ne me porte pas si bien que de coustume. – Cette dissimulation, reprit Astrée, n’est pas assez forte pour vous cacher à nous, ny nostre amitié [83/84] ne devroit pas consentir que vous le voulussiez faire. – Que pensez-vous dire, adjousta Diane, et ne prenez-vous pas garde en la presence de qui vous estes? – Je sçay fort bien, repliqua Astrée, et ce que je dis, et en la presence de qui nous sommes, mais l’honneur que ma maistresse nous fait de vivre parmy nous avec tant de franchise, vous devroit obliger à n’user pas de la feintise, dont il semble que vous veuilliez