Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/149

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faite, il y a quelque temps que ce berger faisait semblant de m’aymer; depuis nous avons des couvert qu’il estoit extremement amoureux de Madonte. – Et qui est cette Madonte? interrompit Alexis. – C’est, adjousta Astrée, une estrangere qui a demeuré quelque temps parmy nous, et que, Diane a opinion que Silvandre ayme. – J’ay opinion? reprit Diane; pourquoy, ma sœur, ne dittes-vous absolument que c’est une estrangere que Silvandre ayme autant qu’il peut aymer, puis que vous sçavez bien qu’il est vray? – Si je le sçavois bien, reprit Astrée, je le dirois comme vous, mais tant s’en faut, je jurerois que tout ce qu’il a fait n’est que par civilité. – O quelle civilité, s’écria incontinent Diane, si vous appellez civilité de pleurer, de prier, supplier et importuner, voire de se jetter aux pieds, et d’embrasser les genoux de Madonte pour avoir la permission de la suivre ! Je ne sçay, dis-je, si vous appellez cela civilité, ce que vous nommerez amour. – Vous avez creu, ma sœur, répondit froidement Astrée, tout ce que Laonice vous a dit, et je ne vous en ay point voulu parler jusqu’au retour de ce berger, afin que nous en puissions sçavoir la verité par sa propre bouche – O dieux! reprit Diane, que vous entends-je dire? Vous voulez tirer la verité de la bouche d’un homme, et homme amoureux, et pour dire tout, d’un Silvandre qui a opinion de pouvoir par son beau discours, esblouir aussi bien les yeux de nos esprits, que les sorciers ceux de nos corps? Vous la pouvez. aussi