Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/169

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vie, me conduira bien-tost au lieu où j’espere la trouver, cette guerison, qu’elle pense estre impossible.

A ce mot, apres les avoir remerciées du secours qu’elles luy avoient rendus, il s’en voulut aller, mais considerants toutes combien il avoit l’œil farouche et hagard, elles eurent peur qu’il n’eust dessein de se mesfaire; et Astrée, comme bien experimentée a un semblable accident, le retenant par le bras, et ayant bien cognu aux paroles qu’il luy avoit respondues, qu’il la prenoit pour une druide estrangere: Sçachez, berger, luy dit-elle, que ce Genie duquel vous parlez, m’a ce matin ordonné de me trouver icy à l’heure que j’y suis venue, tant pour vous secourir que pour vous dire de sa part que vous viviez avec assurance que son ayde ne vous defaillira non plus en cette occasion, qu’elle ne vous a pas manqué en toutes les autres où vous en aveu eu besoing, et que trois jours ne s’escouleront point sans que vous le ressentiez favorable, pourveu toutesfois que la foiblesse de vostre courage ne luy oste, et la volonté, et le loisir de le pouvoir faire. Et souvenez-vous que je le vous ay dit en la presence de ces bergeres, que j’en prends pour tesmoins. A ce mot d’Astrée, qui avoit desguisé sa voix le mieux qu’il luy avoit esté possible, de peur d’estre recognue, s’en alla, faisant semblant de ne cognoistre pas une de ces bergeres qui estoient autour de luy, et de n’estre venue en ce lieu que pour le seul sujet qu’elle luy avoit dit.

Et voyez combien l’opinion de la divine assistance a de pou [97/98] voir sur l’esprit des hommes! Astrée