Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/177

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la parole de peur d’estre ouye, il ne sçait que respondre, et il veut le luy faire redire pour [101/102] avoir le loisir d’inventer quelque mauvaise excuse. Elle ouyt alors que Phillis reprenoit: Avouez librement, Silvandre, que vous avez esté trompé, et que vous ne pensiez pas qu’il y eust personne en la compagnie, qui deust remarquer vos actions, ou qui, les ayant remarquées, les vinst redire à Diane. Aussi crois-je bien que celle par qui elle les a sceues, ne pensoit pas mal faire, car elle parloit trop naifvement. – Mais encore, reprit Silvandre, que dit-elle? – Elle dit, adjousta Phillis, que vous-mesme vous estiez fait le mal, duquel depuis vous estiez pu guerir, car ayant rencontré Madonte, vous l’ aviez advertie de la venue de quelque estranger, qui la cherchoit avec un mauvais dessein. – Il est vray, respondit le berger, je l’ay fait, mais pensant y estre obligé par les loix de la preud’hommie. – Les loix de la preud’hommie, repliqua Phillis, ne vous ordonnoient pas de l’accompagner jusques en Aquitaine, ny moins, lors qu’elle ne l’a pas voulu, de vous mettre à ses genoux, les luy embrasser, et avec des torrents de larmes luy noyer les mains pour la presser, et en fin, forcer par les plus extraordinaires conjurations que vous avez pu imaginer, de vous permettre pour le moins de la suivre une partie du jour luy disant, apres qu’elle y a esté contrainte par vos pleurs, qu’elle vous pouvoit bien permettre le contentement d’estre un peu de temps auprés