Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/178

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d’elle, au lieu de l’eternel desplaisir que son esloignement vous laisseroit. Mais, et voicy ce que je trouve de meilleur, lors qu’elle vous a respondu en sousriant, que si son absence vous donnoit de l’ennuy, la presence de Diane vous consoleroit… Diane, avez-vous respondu, merite beaucoup mieux que mon service, aussi ne luy en ay-je jamais rendu que par gageure. Et pleust à Dieu qu’elle eust à faire le voyage pour vous, et vous à demeurer icy pour elle. Vous semble-t’il, berger, que les loix de la preud’hommie vous pussent commander de tenir ces discours à Madonte, et de parler avec un tel mépris de Diane? Et trouvez-vous estrange qu’en estant advertie, elle s’en soit offensée, et en mesme temps se soit resolue à vous oster toute sorte d’occasion de la pouvoir plus traitter tant indignement?

– O Dieu! s’escria Silvandre alors, ô Diane! Et quelle trahison est celle que vous me racontez? – Trahison? dit Phillis, et pouvez-vous nier, s’il y en a, que ce ne soit de vostre costé qu’elle vienne? – Comment? reprit incontinent le berger, que j’aye fait ny dit ce que vous me reprochez? J’aimerois mieux [102/103] que ma houlette m’eust esté msie au travers du cœur, que si une telle pensée y avoit jamais eu place. – Et me nierez-vous, repliqua Phillis, que vous n’ayez accompagné cette Madonte, tant avant qu’elle vous l’a voulu permettre? – J’advoueray, respondit Silvandre, qu’il est vray que je l’ay accompagné, mais pour des raisons, que si j’eusse fait autrement, j’eusse esté blasmé par tous ceux qui