Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/189

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sque tout à cette heure? Je ne croy pas qu’il soit possible de s’ennuyer en sa compagnie, et je m’asseure que, quand vous aurez parlé à luy, vous en direz autant que moy. – Et dites-moy, respondit-elle, je vous supplie, comment pouvez-vous croire que, si c’est un homme, Dorinde s’y puisse plaire? Dorinde qui proteste que si elle-mesme estoit homme, elle se voudroit mal. – Je veux croire, repliqua Circene, et j’en feray gageure avec vous, que, quand vous aurez veu Silvandre, si vous continuez de vouloir mal à tous les hommes, vous direz pour le moins que ce berger n’est point homme. – Et que seroit-il donc? adjousta-t’elle. – Quelque chose de plus, reprit Circene, et l’essay ne vous en coustera que le temps que vous y employerez. – Il faut bien veritablement, dit Dorinde, s’il arrache cette confession de ma bouche, qu’il soit plus qu’homme. Et si toutesfois je ne me puis imaginer que, si un Dieu, et cela soit dit sans blaspheme, prenoit la figure d’un homme, il ne devinst traistre et ingrat, ny que je me puisse empescher de le hayr. – Vous avez bien mauvaise opinion des hommes, adjousta Florice. – Pire encore, repliqua Dorinde, que je ne vous sçaurois dire, ne croyant pas qu’il y en ait jamais eu un seul qui ait sceu aymer. – Vous perdez cette opinion, dit Palinice, quand vous verrez Silvandre auprés de Diane. – Je ne sçay, respondit Dorinde, ce que je feray, mais si fais bien, que jusques icy je n’ay veu femme qui l’ait creu autrement, qui n’ait esté trompée, ou par elle-mesme ou par autruy. – Quand vous entendrez,