Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/34

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dans la cité des Rhemois. – O dieux! madame, s’escria Leonide, Clidaman est mort? – Parlez bas, respondit-elle, de peur que quelqu’un ne vous entende, car il le faut tenir encores caché pour quelque temps, si nous ne voulons tomber sous la plus indigne tyrannie qui se puisse imaginer. – Et pourquoy, madame, dit-elle, avez-vous cette doute, et de qui craignez-vous l’insolence? – De celuy, respondit la nymphe, qui a eu desja la hardiesse et le courage de me tromper, j’entends de Polemas. II faut que vous sçachiez que cet outrecuidé, porté d’une presomption incroyable, a non seulement eslevé ses desseins à m’espouser, comme vous avez entendu par sa bouche, et par celle de Climante, et comme nous avons appris par diverses conjectures, mais de plus, à m’espouser, quoy que ce fust contre ma volonté. Et à cet effet, il a premedité de loin une tres-insigne trahison et contre moy et contre tout l’Estat, afin de se rendre maistre à mesme temps de tous les deux. Vous avez sceu les meschantes actions qu’il a faictes contre Damon, et nous avons esté adverties qu’il a de tres-grandes intelligences avec Gondebaut le roy des Bourguignons, sans nostre sceu, et il n’y a point de doute que desjà il eust esclos sa trahison, [16/17] n’eust esté qu’il redoute Clidaman, mais s’il en sçavoit la mort, il n’y auroit plus rien qui le retinst. Et c’est pourquoy Amasis a escrit à Lindamor de venir en la plus grande diligence qu’il luy seroit possible, à quoy je m’assure qu’il ne manquera pas; mais il y a si loin