Page:Urfé - L’Astrée, Quatrième partie, 1632.djvu/56

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fin. Et que sçaurions-nous desirer à ce commencement de plus heureux? Dans cette contrée, tout est à vous; dehors il n’y a prince voisin qui ne vous ayme, et qui ne vous favorise. Tous ceux qui vous pourroient nuire sont bien loin de vous, et tellement embarrassez aux affaires d’autruy, qu’ils nous donneront tout le loisir que nous voudrons pour faire les nostres. Et le bon, c’est que Clidaman, qui en quelque sorte nous pourroit nuire, employe son temps auprés d’un prince tant esloigné de nous, que son secours ne luy peut jamais estre guere utile, au lieu que vos amitiez et vos confederations sont avec ceux qui ne sçauroient estendre la main qu’ils ne vous touchent; si bien que nous n’avons à faire qu’à des femmes, qui, à la verité, sont redoutables en amour, mais grandement inutiles en la guerre. – Mais, reprit Polemas, si ne me nierez-vous point qu’Adamas, duquel nous n’avons jamais pu gaigner la bonne volonté, est un puissant ennemy, pour le credit qu’il a en cette contrée, et que l’authorité d’Amasis, et l’esprit aliené de Galathée, nous seront un grand empeschement. – Souvenez-vous, respondit Climante, que toute chose agit selon sa nature, et qu’Adamas vous peut nuire en paroles, tant que vous ne viendrez point aux [29/30] effects; mais aussi-tost que les armes parleront, asseurez-vous que les livres se tairont. Et quant à Amasis, elle aime de sorte Galathée, qu’elle ne contredira jamais à ce que sa fille voudra. – Mais, interrompit incontinant Polemas, c’est bien là qu’est la grande difficulté, car Galathée, qui est jeune et volontaire,