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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/10

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lieux, c’est estre amant avisé et prévoyant. Que de se donner tout à une, c’est se faire devorer à un cruel animal, et qui n’a point pitié de nous. Et bref, que le change est la vraye nourriture d’une amour parfaite et accomplie.

Or considere, berger, comme tu dois esperer de trouver quelque juge favorable parmy ces personnes préocupées d'une opinion si differente ; et, si tu m’en crois, ne te laisse voir qu’à ton Astrée, et te tiens caché à tout autre.

Mais quoy ? tu rejettes mon conseil, et pour toute raison tu me respons que tu t’es de sorte dedié à la gloire d’Astrée, que les siecles et les opinions des hommes pouvant changer en bien aussi bien qu’en mal, tu desires qu’à l’advenir on recognoisse quelle a esté la beauté, et la vertu d’Astrée, par les effets de ton amour, et par les tourments que tu auras endurez. J’advoue, mon berger, ce que tu dis, et qu’il peut estre que les amants reviendront à ceste perfection qu’ils méprisent