Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/9

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comme faisoient les chevaliers de la Table-ronde, ou le Beau Tenebreux. Qu’il n’y a plus d’Arc des loyaux amants, ny de Chambre deffendue pour recevoir quelque fruict de ceste inutile loyauté. Que si toutesfois il y a encores quelques chambres qui se puissent appeller deffendues, elles le sont seulement à ceux qui aiment comme tu faits, pour chastiment de leur peu de courage, et pour preuve de leur peu de bonne fortune.

Et bref, que l’on tient aujourd’huy des maximes d’estat d’amour bien differentes, à sçavoir qu’aymer et jouir de la chose aymée, doivent estre des accidens inseparables. Que de servir sans recompence sont des tesmoignages de peu de merites. Que de languir longuement dans le sein d’une mesme dame, c’est en vouloir tirer l’amertume, apres en avoir eu toute la douceur. Que d’obeir à celle que l’on ayme, en ce qui nous esloigne de la possession du bien desiré, c’est imiter ceux qui vont à contrepied de leur chasse. Que d’aymer en divers