Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/1000

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de peur ou autrement, il se laissa choir en terre, où incontinent ceux qui venoient apres moy acheverent de le tuer, tant chacun estoit animé contre sa perfidie, et contre son peu de courage. Ainsi finit ce tyran, tant hay des siens que, quand il fut mort, ils le mirent en pieces, et les jetterent dans la riviere, comme s’ils eussent voulu effacer son offence de ceste sorte, mais toute l’eau du Tybre n’eust sceu laver la moindre de celles qu’il avoit commises, fust contre l’empereur, fust contre la belle Eudoxe, ou contre tout l’Estat.

Or je vous ay raconté jusques icy de miserables accidens pour la belle Eudoxe, ou pour moy. Mais ceux que j’ay maintenant à vous dire sont bien encores plus fascheux. Car, helas ! ce sont ceux qui m’ont reduit en I’estat où vous m’avez veu, lors que le Ciel tant inopinément vous a fait arriver pour me sauver la vie, et quoy que je n’y espere remede quelconque que celuy que vous m’avez empesché, je veux dire la mort, si ne laisseray-je de continuer pour satisfaire à la priere que vous m’en avez faite.

Voilà donc Genseric arrivé dans la ville. Il y entra sans trouver resistance, et sans qu’une seule porte se houvast fermée. Eudoxe le reçoit, l’appeilant du nom d’Auguste, et luy dit que l’empire luy doit sa liberté ; bref, luy rend tous les honneurs et les remercimens qui luy sont possibles. Mais