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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/1005

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ma mort à la belle Eudoxe, qui toutesfois ne luy fut cachée par Genseric, à ce que depuis nous avons sceu. Tant y a que me faisant porter sur des brancards, je ne sçay si ce fut le marcher des chevaux, qui par le brandement esmeut mes sentiments, ou qu’estant couvert de quelques habits, la chaleur qui destoit point encor esteinte du tout en moy, reprit force peu à peu, tant y a que je donnay signe de vie. Olimbre qui avoit continuellement l’oeil sur moy, s’en prit garde incontinent, et plein d’une joye incroyable, me fit mettre dans la premiere maison qu’il rencontra, où il me secourut de sorte qu’en fin je revins de ce long évanouissement.

Vous pourriez mieux sçavoir de luy, amy Silvandre, que je ne vous sçaurois dire, quel extreme contentement fut le sien, quand apres m’avoir pleuré mort, il me revit en vie. Ceux qui le virent en cest estat, jugerent bien que sa vie ne luy estoit pas plus chere que la mienne ; et toutesfois nous eussions esté l’un et l’autre beaucoup plus heureux, si mes jours eussent esté finis en ceste rencontre. Car je n’eusse point eu les desplaisirs que l’absence et le ravissement d’Eudoxe m’ont depuis apportez, et Olimbre ne seroit point separé de sa chere Placidie, ny udoxe abandonnée d’olimbre duquel elle eust receu plusieurs services en ceste occasion, sans ceste vie miserable qui ne m’est restée que pour un plus grand malheur. Ceste consideration