Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/1009

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lors qu’il voudra disposer non seulement de sa vie et de sa mort, mais de tous autres affaires d’importance. Et d’autant que les amis sont le plus souvent interessez en ce qui touche le bien ou le mal de la personne qu’ils ayment, ce grand Dieu ne voulant point laisser encor en cecy l’homme sans une bonne guide, luy a donné des juges et des rois qui en ordonnent ainsi qu’ils trouvent à propos.

Pour nos dissentions qui touchent le bien, ou quelque offence receue, le Senat y pourvoit tres sagement, mais pour les outrages de la fortune, parce qu’elle a tousjours esté tant aymée du peuple et de l’empire romain, il n’en a pas voulu estre le juge, cognoissant bien que comme les amis sont interessez en la cause de leurs amis, il ne pouvoit, que juger favorablement et à l’advantage de la fortune. Toutesfois ce grand Createur des hommes qui les ayme comme ses enfans, les a voulu pourvoir de tout ce qui estoit necessaire pour vivre et mourir en hommes, et pour ce suject a inspiré ces grands et prudens Massiliens de s’en establir les juges, leur semblant que la mort n’estant point un tort, ny un outrage, mais un tribut de nature, c’est faire tres-injustement et tres-laschement de refuser le remede.à ceux qui avec raison le demandent, que le temps en fin ne peut nyer à leur aage. Et pourtant il y a un lieu public en leur ville où ils gardent du poison meslé avec de la ciguë,