Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/109

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Vous estes aussi bien obligée à cecy par nostre amitié, que je le suis par le devoir, puis que si vous pouvez refuser ce que vous cognoissez que je desire, et que le devoir me commande de desirer, quelle force dira-t’on que l’amour a sur vostre ame ? Aymez donc Calidon, si jamais vous avez aymé Thamire, recevez-le pour Thamire, et faictes vous paroistre en une seule affection, et amante, et reliegieuse envers les dieux, qui sans doute ne m’eussent point donné la liberté de me dépouiller de vous contre mon vouloir, s’ils ne l’avoient ainsi resolu dans leurs destins infaillibles.

Grande et sage nymphe, ces paroles que Thamire a proferées, ou a deu proferer, et dont j’ay servy d’instrument, sont, ce me semble, et si veritables, et si dignes de luy, que vous en remettant le jugement entier, je m’asseure qu’il ne m’en desdira point. C’est pourquoy, apres vous avoir juré par Tautates, que Calidon ayme, et qu’il n’y eut jamais un plus veritable amant que luy, je n’adjouteray point d’autres raisons aux siennes, mais seulement remettant et ma vie, et ma mort entre vos mains, je prieray tous nos dieux, qu’ils vous soient aussi justes, que vous me le serez.

Calidon acheva de ceste sorte, avec une grande reverence, et se rapprochant de Celidée, se remit à genoux devant elle, attendant