Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/150

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a principalement un tres-grand pouvoir en amour, puis qu’ayant un si doux entretien que celuy de ses pensées, pour lesquelles il mesprisoit toutes choses, hormis la veue de Diane, il estoit toutesfois content de les interrompre, pour apprendre des nouvelles de ceux qu’il ne cognoissoit point.

Les quittant donc pour quelque temps, et donnant cela à sa curiosité, il tourna ses pas du costé où il oyoit parler, et se laissant conduire par la voix à travers les arbres et les ronces qui s’espessissoient davantage en ce lieu, il ne se fut advancé quinze ou vingt pas qu’il se trouva dans le plus obscur du bois, assez prés de deux hommes, qu’il luy fut impossible de recognoistre, tant pour l’obscurité du lieu, que pour ce qu’ils avoient le dos tourné contre luy. Il vit bien toutesfois à leurs habits, que l’un estoit druide, et l’autre berger. Ils estoient assis soubs un arbre qui abreuvoit ses racines dans la claire onde d’une fontaine, de qui le doux murmure et la frescheur les avoit conviez à passer en ce lieu une partie de la nuict.

Et lors que Silvandre estoit plus desireux de les cognoistre, il ouyt que l’un d’eux respondoit à l’autre de ceste sorte : Mais, mon pere, c’est une chose estrange, et que je ne puis assez admirer, que celle que vous me dittes de ceste beauté ; puis que, selon vostre discours, il faudroit advouer qu’il y en a d’autres beaucoup plus parfaittes que celle de ma maistresse, ce que je