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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/153

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nature, beaucoup plus que d’autres, qui toutesfois ne se peuvent dire imparfaictes, ayant autant de perfection, qu’elles en peuvent recevoir ; et c’est de celles-cy que sera vostre maistresse, que sans offence vous pouvez dire parfaicte, et advouer moindre que ces pures intelligences dont je vous ay parlé. Que si toutesfois vous ne vous laissiez emporter aux folles affections de la jeunesse imprudente, faisant peu de conte de ceste beauté que vous voyez en son visage, vous mettriez toute votre affection en celle de son esprit, qui vous rendoit aussi content et satisfait que l’autre jusques icy vous a donné d’occasions d’ennuy, et peut-estre de desespoir.

- Il y a long temps, respondit le berger, que j’ay ouy discourir sur ce subject, mais les desplaisirs que j’ay soufferts m’en avoient osté la memoire. Je me souviens à ceste heure qu’il y avoit un de vos druides qui taschoit de prouver qu’il n’y avoit que l’esprit, la veue, et l’ouye qui deussent avoir part en l’amour. D’autant, disoit-il, que l’amour n’est qu’un desir de beauté, y ayant trois sortes de beauté, celle qui tombe sous la veue, de laquelle il faut laisser le jugement à l’œil, celle qui est en l’harmonie, dont l’oreille est seulement capable, et celle en fin qui est en la raison, que l’esprit seul peut discerner, il s’ensuit que les