Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/172

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Belle bergere, respondit Silvandre, n’en faites point de difficulté pour la consideration de ma peine ; car ce n’est tant de plaisir de faire service à une personne si pleine de merite, que quand mon naturel seroit encores beaucoup plus contraire à l’amour, si ne laisserois-je de le continuer avec contentement. – Quand cela seroit, dit Diane en sousriant, vous n’auriez accordé qu’avec une des parties ; car encores que vostre naturel y consentist, vous ne devez jamais esperer que je m’a accorde pour l’interest que j’y ay. Ces paroles toucherent de sorte au cœur de Silvandre, cognoisant combien il avoit peu gaigné sur sa volonté, que ne pouvant cacher le desplaisir qu’il en ressentoit, son visage par un changement de couler le descouvrit. De quoy Astrée s’appercevant : Vous est-il, luy dit-elle, survenu quelque defaillance de cœur ? – Il est bien mal-aisé, repliqua le berger, que ces cruelles paroles de ma maistresse ne m’affligent ; mais ne croyez pourtant que le cœur jamais me deffaille, quoy qu’elle est le Ciel puissent ordonner de mon contentement et de ma vie. – N’est-ce point, respondit Astrée, temerité plustost que courage qui vous fait deffier deux telles puissances ? – Ce n’est, repliqua le berger, ny temerité ny courage, mais une tres-veritable et tres-fidelle amour qui me fait parler de ceste sorte. Tels estoient leurs discours, par lesquels Diane cognoissoit que veritablement