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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/201

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car jusques icy elle a pensé qu’elle aimoit, et maintenant elle voit le contraire. Ces belles bergeres alloient de cette sorte, trompant la longueur du chemin. Et parce que c’estoit sur le haut du jour, et que le soleil estoit en sa plus grande force, elles demanderent à Silvandre s’il y avoit beaucoup de chemin jusqu’au lieu où il les vouloit conduire. Et ayant sceu qu’elles n’en avoient encores fait la moitié, elles resolurent de s’arrester à la premiere fontaine, ou sous le premier bel ombrage qu’elles rencontreroient ; car Silvandre leur dict qu’elles en trouveroient une bien tost, où mesme il y avoit un cerisier tout chargé de fruicts. En cette resolution, elles redoublerent leurs pas ; mais la rencontre qu’elles firent de Laonice, de Hylas, de Tircis, de Madonte, et de Tersandre, les arresterent quelque temps. Ces bergers et bergeres alloient se promenant ensemble, cherchant les fresches ombres, et les agreables sources des fontaines, parce qu’estant estrangers, et n’ayant nul troupeau à garder, ils n’employoient le temps qu’à passer leur vie le plus doucement qu’il leur estoit possible. Et ayant ce jour là fait dessein de ne s’abandonner point, ils s’alloient promenant contremont la douce et delectable riviere de Lignon. Or cette