Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/213

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c’est d’acquerir les bonnes graces de tous ceux qui abouchent ou d’amitié ou de parentage à la personne aimée, il fit tout ce qu’il peut pour estre amy de Clorian ; ce qui luy fut fort aisé, pource que ce jeune homme estoit courtois et bien nay, et de son costé avoit ce mesme dessein d’estre aimé de tous. Mais d’autant que Hylas estoit plus fin et plus rusé, soit pour avoir plus voyagé, soit pour avoir plus d’aage, il se contenta de feindre ce que Clorian fit à bon escient ; et par ainsi il ne fut son amy que comme le commun, au lieu que l’autre l’aimoit comme si c’eust esté son frere. Pour le moins ce qui s’en ensuivit en donna cognoissance ; car Clorian augmentant de jour à autre en son affection envers Circéne, sans la luy oser faire sçavoir par ses paroles, Hylas en fin s’en print garde de cette sorte. Circéne estoit partie pour aller voir son pere, qui estoit tombé malade en une ville du costé des Allobroges dans le pays des Sebusiens, et sa maladie fut telle, que jamais il n’en releva depuis ; cela fut causé qu’elle demeura long temps hors de nostre ville, et que par conséquent Clorian ne la voyoit point.

Et parce qu’à ce que j’ay ouy dire, il n’y a rien qui soulage plus celuy qui ayme bien, que de penser en la personne aymée, Clorian se retiroit bien souvent en une maison qu’il avoit dans l’enceinte mesme de la ville, sur le haut de ceste montée