Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/218

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quelques unes s’en doivent offenser quand on le leur dit, ce sont les laides, parce qu’il y a apparence que l’on se mocque d’elles. –- Je ne pense pas, respondit Clorian, qu’elles s’en offencerit pour estre belles, mais ouy bien pour estre honnestes. – Comment, adjousta Hylas, qu’une femme pour honnesje qu’elle soit, se puisse fascher d’estre aimée ? Ah ! Clorian mon amy, ressouvenez-vous que la mine qu’elles en font, quand on le leur dit, n’est pas pour estre marries qu’on les aime, mais pour estre en doute qu’il ne soit pas vray. Et d’effet, où est la femme, qui estant bien asseurée de l’affection d’un homme, ne s’en est en fin fait paroistre tres contente, et ne luy en a rendu des tesmoignages ? Non, non, Clorian, de toutes les actions que nous faisons, apres celles qui conservent la vie, il n’y en a point de plus naturelle, que celle de l’amour. Et tenez-vous les femmes pour tant ennemies de la nature, qu’elles hayssent ce qui est naturel ?

Je vous veux donner conseil, encor que vous ne me le demandiez, et si vous le suivez, vous verrez bien tost que je ne suis pas apprentif en semblables choses. Faites sçavoir à Circéne que vous l’aymez, et cela le plus promptement que vous pourrez ; car plus-tost elle le sçaura, plustost aussi en sera-t’elle asseurée, ret tant plustost elle vous aymera. Il n’y a point de doute qu’au commencement elle tournera la teste à costé, qu’elle