Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/234

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Cette preuve, continua Phillis, n’est pas petite. Mais je doute infiniment de ce que je vous veux deman­der. Dites-moy donc, avez-vous aymé ces estrangeres que vous venons de laisser? – Vous le pouvez apprendre, respondit-il, par les paroles de Florice: – Je ne fais pas, dit-elle, cette demande sans raison ; car si vous les avez aimées, comment les avez-vous si tost laissées en ce lieu, où elles sont mesmes estrangeres ? – Tout ainsi, respondit Hylas, qu’autresfois j’en ay laissé d’autres pour elles, de mesme je les laisse maintenant pour vous. Et je confesse bien que si l’amour que je vous porte n’eust eu plus de puissance sur moy que la civilité, j’eusse esté en quelque sorte obligé à quelque assistance ; mais je vous aime tant, que je ne puis avoir autre consideration que celle qui depend de mon amour. – Je ne nie pas, dit Phillis, que vous ne m’obligiez beaucoup, mais je vous admire en ce que les ayant aimées, vous en faites à cette heure si peu de conte. – Je les ay aimées, respondit Hylas, mais je ne les ayme plus, et parce que l’amour me retenoit autre­fois aupres d’elles, maintenant que cette amour est morte, elle ne le peut plus faire, et me semble qu’en cela il n’y a pas grand . subject d’admiration, ou de mesme il faudroit s’es tonner de voir un homme libre, lors que la corde qui le souloit lier se seroit usée et rompue. – Je crois, interrompit Silvandre, que Hylas n’a. jamais