Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/250

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pas, ny celuy non plus qui l’a dite, sinon par opinion. – Si vous voulez sçavoir, respondit le vieil chevalier, qui me l’a fait juger ainsi, je le vous diray, et m’asseure que vous ferez un jugement semblable au mien. – Je seray bien aise, respondit-elle, d’apprendre ce secret de vous. – Vous voyez, reprit alors le vieil chevalier, qu’il porte une Sirene en son escu, avec ces mots : quels liens faut-il ? Il ne pouvoit vous nommer plus clairement que par la peinture d’une Sirene, parce que les anciens ont tenu que les Sirenes estoient trois filles d’Achelois, et de la nymphe Calliope, et se nommoient Ligée, Leucosie, et Parthenopé ; et vous, vous appelant Parthenopé, il estoit bien malaisé qu’il peust vous faire voir plus clairement son intention, que par une Sirene, et un Ulysse lié à l’arbre de son vaisseau, voulant entendre qu’il n’y a rien qui le peust empescher de se donner à vous, si par vos faveurs vous le vouliez rendre vostre.

Alors toute la trouppe frappant des mains, s’escria: Ah Parthenopé ! vous nous l’avez tenu bien secret, mais il vaut autant l’advouer maintenant que de le nier. – Quant à moy, dit-elle, ce m’est tout un, et que cela soit, ou non, il m’importe fort peu. –Vous ne vous fascherez donc point, dit Circéne, que nous le nommions vostre chevalier ? – Je ne m’en soucie point, dit-elle,