Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/291

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tes trahisons ? Et se taisant encores pour quelque temps, tout à coup elle frappa des deux mains sur la table : Il ne sera pas vray, perfide, que ta trahison demeure impunie, je la descouvriray pour le moins à celle pour qui tu l’as commencée, encor que tu l’ayes parachevée en moy, et peut-estre se renda-t’elle sage à mes despens.

Elle n’eust plustost fait ce dessein, que ramassant ces lettres, et prenant en sa liette les autres, que je luy avois données, elle s’en alla trouver Dorinde, la pria d’aller en son cabinet, où estant : Ma belle parente, luy dit.elle, (car c’estoit ainsi qu’elle la nommoit) je vous veux rendre une preuve d’amitié qui n’est pas petite, mais je vous conjure de vous en servir avec prudence. Il y a quelque temps que Hylas vous recherche, et vous avez creu d’estre aimée de luy ; je viens icy pour vous detromper, et vous faire voir qu’il vous abuse. A ce mot Dorinde rougit, et voulant en faire la froide. Non non, dit Florice, ne pensez pas, ma parente, de pouvoir me cacher ce que je sçay mieux que vous. Je dis mieux, car vous sçavez seulement vostre intention, et vous ignorez la sienne, au lieu que je les sçay toutes deux. – Vrayment, dit Dorinde, si cela est, vous estes bien sçavante. Mais que sçavez-vous de moy ? – Je sçay, dit-elle, que vous l’aimez, que vous luy avez envoyé vostre peinture, et que vous recevez les assignations qu’il vous donne.