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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/292

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Dorinde qui se sentit convaincue par la verité, n’ayant pas l’effronterie de le nier, baissa les yeux, et rougissant encore d’avantage, se mit de honte la main sur le visage.

Qu’il ne vous ennuye point, Dorinde, continua-t’elle alors, que ces choses me soient connues, et au contraire, resjouissez- vous que le tout soit tumbé entre mes mains, et non point entre celles de quelque autre qui vous eust moins aimée. Et à l’advenir retirez-vous, si vous aymez vostre honneur, de l’amitié de cest homme qui ne vous recherche que pour se vanter des faveurs que vous luy faites, et à l’aventure pour en feindre plus qu’il n’y en a pas.

Il y a eu autresfois quelque familiarité entre luy et moy ; cela a esté causé, et faut croire que ç’a esté pour vostre bon heur, qu’il s’est addressé à moy. Je ne croy pas que vous ayez dit une seulle parole qu’il ne m’ait racontée. Et parce qu’il seroit trop long de les vous redire, voyez, luy dit-elle, voicy la plus part des lettres que vous luy avez escrites, que vous ferez fort bien de brusler, afin qu’il ne s’en puisse prevaloir.

Dorinde, les ayant prises et recognues, advoua librement qu’elle avoit creu d’estre aimée de moy, et que cela l’avoit obligée à tout ce qu’elle avoit faict, mais qu’à l’advenir elle me haïroit au double de ce qu’elle m’avoit aymé, qu’elle luy avoit une infinie obligation de cet advertissement, et qu’elle