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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/303

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en quelle confusion de pensée elle pouvoit estre, et combien elle avoit de divers combats en son ame. En fin elle resolut que la mort seroit celle qui la garentiroit de ces desplaisirs, non pas qu’elle eust le courage de se donner du fer dans le sein (car le penser seullement de telle cruauté la faisoit fremir) mais elle esperoit bien que la vie ne sçauroit luy demeurer longuement parmy tant de cruelles peines. Et voyez que c’est que l’amour. Elle n’avoit point tant de regret de me perdre, ny de se voir à une personne qu’elle n’ay- moit point que de penser que je jugerois mal de l’amitié qu’elle m’avoit portée. Car encor elle fust en colere contre moy à cause de Dorinde, si est-ce qu’elle ne laissoit poit de m’aymer, m’excusant mesme en ce que je ne l’aimois plus, et s’accusant de ce deffaut d’amitié, pour l’offence qu’elle m’avoit faite. Estant en ceste peine, elle resolut d’avoir cette satisfaction de soy-mesme, puis qu’elle ne pouvoit eviter le mariage de Teombre, de me faire sçavoir, pour le moins, que sa foy n’estoit point changée, ny que son affection ne seroit jamais autre que je l’avois esprouvée. La lettre fut telle.