Elle rougit alors, et me demanda pourquoy je faisois ce jugement d’elle ? – Parce, luy dis-je, que mesurant les autres par vous, ainsi que vous aymez tout ce que vous voyez, vous pensez aussi que chacun soit amoureux de vous, et j’ay sceu que vous estes en cet erreur de moy, croyant que j’en meurs d’amour. Mais je veux bien que vous sçachiez que vous avez trop peu de merite pour me donner seulement la volonté de vous regarder. Et si vous vous l’estes figuré autrement, des-abusez-vous, et croyez que Hylas auroit honte de vous avoir aymée, ou s’il avoit fait ceste faute, de la continuer maintenant.
Pensez, gentil Paris, quelle devint Dorinde ! Quant à moy, pour n’entrer en plus de parolles avec elle, à ces derniers mots je m’en allay, la laissant la plus confuse personne qui fut jamais. Depuis ce temps Florice, plus satisfaite que je ne vous sçaurois dire, se redonna toute à moy, et si Teombre la gardoit comme mary, je la possedois comme amy.
Mais Dorinde, animée à outrance contre moy, se resolut de me rendre tous les desplaisirs qui luy seroyent possibles ; et descouvrant le renouement de l’amitié de Florice et de moy, fit dessein de m’y traverser en tout. Et parce que je ne la voyois plus, encores que ce fut bien à regret, car je l’aymois, quoy que ce fut moins que Florice, elle jugea que Periandre seroit un