Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/328

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d’une heure. Et puis que la rigueur de ceste bergere n’a point de consideration de la contrainte en quoy elle le retient, faisons-nous paroistre plus discrettes, et leur rompant compagnie, donnons-luy occasion de cesser. Aussi bien la grande chaleur qui nous a retenues en ce lieu est desja abatue, et le promenoir d’or en là sera plus agreable que le discours.

Et à ce mot elle se leva, et le reste de la compagnie la suivit, et mesme Hylas prenant Phillis sous les bras : Je suis bien aise, dut-il, ma maistresse, que les plus insensibles ressentent une partie de la peine que vous me donnez, et reconnoissent l’amour que je vous porte. Il disoit ces parolles pour Astrée qu’il tenoit pour personne qui n’eust jamais rien aymé. Et voilà comme nostre jugement est deceu bien souvent par l’apparence ! Et Phillis le voulant laisser en ceste opinion : Ceux qui ayment bien, dit-elle, n’essayent pas de rendre preuve de leur affection par le rap- port des personnes qui ne sçavent pas aymer, mais par leurs propres services. Et quant à la patience que vous avez eue de parler si longuement, n’en estes-vous pas surpayé par celle que j’ay eue de vous escouter ? – C’est, dit Hylas, une chose insupportable que l’arrogance et l’ingratitude de bergeres de ceste contrée  !

Et parce que Phillis voulut suivre ses compagnes, il la