Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/340

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d’arcs et de flammes, et par cet eschange de fleches, l’union de deux volontez en une et, comme disent les plus sçavants, que l’Amant et l’Aymé ne sont qu’un. De sorte, à ce que je puis voir, ce tableau ne vous veut representer que les efforts de deux amants pour emporter la victoire l’un sur l’autre, non pas d’estre le mieux aymé, mais le plus remply d’amour, nous faisant entendre que la perfection de l’amour n’est pas d’estre aimé, mais d’estre amant. Que si cela est, ma belle maistresse, dit-il, se tournant vers Diane, voyez combien vous m’en devez de reste. – J’advoue librement, dit-elle, que de cette sorte j’ayme mieux estre en vos dettes que si vous estiez aux miennes.

Hylas estoit à l’entrée et n’osoit passer outre, quoy qu’il en eust beaucoup d’envie, et plus encore, lors que, penchant dedans la moitié du corps, il vid l’autel de gazons et le tableau qui estoit dessus, Et parce qu’il ne le pouvoit bien voir, il prestoit l’aureille fort attentive aux discours de Silvandre, et en mesme temps il ouyt que le berger respondit à Diane : Je voy bien, ma belle maistresse, que vous ny moy ne sommes point representez en ce tableau, puis qu’ils sont chacun amant et aymé, et que vous estes bien aymée, mais non pas amante, et moy amant et non pas aymé, et cela plus par malheur que par raison. –