Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/399

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

contre tous les hommes que jamais vieillesse ne fut plus prudente que cette jeunesse, ny prudence plus sage que cette temerité que vous blasmez en moy. Que si j’ay failly comme vous dites et que vous en soyez coulpable, ce n’est pas pour la façon dont, vous avez vescu avec moy, mais parce qu’estant si belle, vous vous estes rendue si pleine de perfection, qu’il est impossible que tous ceux qui vous verront ne commettent de mesmes fautes que vous me reprochez. Et toutes fois je ne sçay quel demon ennemy de mon contentement, vous met à cette heure des opinions en l’ame si contraires à celles que vous venez de me dire. Et il faut bien que ce soit pour mon malheur que vous les ayez si promptement oubliées : ne m’avez-vous pas dit que l’amour n’offençoit personne ? Si cela est, pourquoy le jugez vous à cette heure autrement contre moy. Mais si ces parolles ne vous contentent, voicy Damon devant vous qui vous offre l’estomac, voire ce mesme cœur qui vous adore, afin que pour vous satisfaire, vous luy donniez tel chastiment qu’il vous plaira, et s’il en refuse un seul (sinon la deffence que vous luy pourriez faire de vous servir) il veut que vous le teniez pour le plus traistre qui fut jamais et le plus indigne de tous les hommes d’estre honoré de vos bonnes graces. – Si je vous ay dit, luy respondis-je, que