Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/400

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l’on ne s’offençoit point d’estre aymée, j’y ay adjousté le respect et l’honnesteté à quoy l’on est obligé. Et quand vous vous fussiez contenté de me rendre preuve de vostre bonne volonté par ce respect seulement, et non point par l’outrecuidance de vos parolles, j’eusse eu autant d’occasion de vous aymer que j’en ay de vous hayr. Car pourray-je bien douter à l’advenir que Damon ne recherche ma honte, puis qu’il a eu la hardiesse de me le dire luy-mesme ? Quelle me pensez-vous, Damon, pour croire que sans vengeance je souffre ces injures ? N’avez-vous point de memoire du pere que j’ay eu ? N’avez-vous point reconnu quelle vie à esté la mienne ? et combien j’ay eu de soin de me conserver non seulement telle que je dois estre mais en sorte que la medisance n’eust occasion de mordre sur mes actions ? Ressouvenez-vous que si vous n’avez ny memoire ny jugement pour ce que je vous dis, j’en ay assez pour tous deux, et que, si vous continuez, vous me donnerez subjet de vous rendre du desplaisir par toutes les voyes que je sçauray inventer. – Madame, me respondit-il incontinent, ne laissez de mettre en avant contre moy toutes les sortes de peine que vous en pourrez imaginer. Celuy qui a peu supporter l’effort de vos yeux ne sçauroit craindre celuy de tout le reste de l’univers. Ce ne sont que des tesmoignages de mon affection qui me seront