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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/402

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que ma faute vous desplaise, pourquoy voulez-vous faire plus de tort en la publiant à tout le monde ?

Il seroit bien mal aisé, sages bergeres, de vous redire toutes les raisons que Damon m’allegua, car je n’ouys jamais mieux parler. J’advoue toutesfois que j’espreuvay bien en ceste occasion que le conseil est tres-bon de ceux qui disent qu’on ne doit jamais declarer son affection à une dame qu’auparavant on ne l’ait obligée à quelque sorte de bonne volonté. Car lors que l’offence qu’elle pense recevoir par telle declaration la veut eslongner, cette bonne volonté qui la tient attachée, l’empesche de le pouvoir faire, et luy fait escouter par force telles paroles, voire en fait faire un jugement plus favorable. Je l’esprouvay, dis-je, à ceste fois, puis qu’il me fut impossible de m’en separer, encor que je ressentisse l’injure que j’en recevois ; au contraire, avant ; que de mettre fin à nos discours, je consentis d’estre aymée et servie de luy, pourveu que ce fut avec honneur et discretion. Et parce que Leontidas avoit continuellement les yeux sur nous, je luy commanday de ne me voir plus si souvent, et de dissimuler mieux qu’il n’avoit fait par le passé, afin de tromper cet homme. Je me souviens qu’en ce temps-là, d’autant que Leontidas, encor que grand et sage capitaine, ne laissoit toutesfois de se laisser posseder