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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/407

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vous portera, la retiendra peut-estre en son devoir, et l’empeschera de ne nous faire tout le mal qu’elle pourroit. – Dieu vueille, me dit-il, ma sœur, qu’il en avienne comme vous dites, mais j’ay bien peur qu’au contraire ceste affection n’ayt une autre fin, car il est impossible que je continue de luy faire bonne chere, et se voyant deceue, Dieu sçait ce qu’elle ne fera point. – Elle ne vous prendra peut-estre pas par force, luy dis-je. – Dieu vueille, me repliqua-t’il, que je sois mauvais devin, et qu’elle ne fasse pas quelque chose de pire encores que ce que vous dittes.

Je vis bien que cette femme luy estoit importune, mais je ne jugeay jamais qu’elle eust de l’amour, et pensois que toutes ses recherches n’estoient que pour mieux faire la complaisante. Et parce qu’encores que Leontidas me fist toute la bonne chere qu’il luy estoit possible, si est-ce que le mauvais traittement que je recevois de sa femme, me faisoit passer une vie fort ennuyeuse. Je respondis à Damon qu’il devoit considerer la miserable vie que je faisois ; que je n’avois contentement que de luy, ny consolation que de Leriane ; que je croyois bien que l’intention de Leontidas et de sa femme avoit esté en mettant Leriane aupres de moy de m’avoir donné un espion, mais que je croyois bien aussi qu’ils pourroyent se tromper, et que