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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/410

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qu’il y eust matrone en Gaule plus sage que Leriane.

Mais si j’avois eu tort en l’amitié que je luy portois, Damon ne se peut excuser qu’il n’ayt failly en cette action, car s’il m’eust montré la lettre qu’elle luy avoit escritte, il n’y a point de doute qu’il m’eust sortie d’erreur, et que nous ne fussions pas tumbez aux malheurs où nous nous vismes depuis. Et ce qui l’en empescha, comme je pense, ce fut la cruelle responce qu’il luy avoit faite, d’autant qu’il eut peur que je la visse et luy en sceusse mauvais gré. Tant y a qu’il me le tint si secret que je n’en sceus rien pour lors.

Or Leriane ayant fait dessein, comme je vous disois, de se venger de ce chevalier, jugea qu’il n’y avoit point de moyen plus propre que celuy que je luy en donnerois. Et sçachant bien que vivant familierement avec moy, il ne pouvoit pas estre qu’il ne s’en presentast quelque bonne occasion, elle se rendit si soigneuse de me voir et de me suivre, que je la pouvois dire l’ombre qui accompagnoit mon corps. Et parce qu’elle avoit un esprit vif, et qui entroit presque dans les intentions des personnes, elle recogneut que Tersandre m’aymoit.

Je dis ce mesme Tersandre que vous voyez qui est en ce lieu avec moy. Il ne faut pas que je vous die ce qui est de sa personne, puis que vous le voyez, sages bergeres, mais ouy bien de