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Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/424

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les branslemens de teste, et la colere que je remarquay en elles me donna volonté, quand ceste bonne femme fut partie, de sçavoir ce que c’estoit. Elle feignit de vouloir et ne pouvoir me le taire, et demeura quelque temps sans respondre. En fin parce que je l’en pressois pour l’amitié que je luy portois, elle me dit : Voyez-vous, ma maistresse, (c’estoit ainsi qu’elle m’appelloit) Damon pense estre fin, et il ne prend pas garde que je suis encore plus fine. Il croit, en feignant de vous aymer, que je ne verray pas l’affection qu’il porte à Ormanthe. Cette ruze seroit bonne si ce n’estoit point ma niece, mais cela me touche trop pour n’avoir les yeux bien clairs en semblables affaires, outre qu’il se laisse tellement emporter au delà de toute prudence, qu’il faudroit bien estre aveugle pour n’y prendre garde. Je pense que plus de mille personnes m’en ont advertie, et voilà cette bonne femme qui ne m’est venue trouver que pour me dire qu’ils vivent de sorte que chascun en parle si desadvantageusement pour sapetite niepce, qu’elle ne me le peut celer, et que mesme je ne suis pas, exempt du blasme de le souffrir puis qu’elle est sous ma charge. J’en ay tansé plusieurs fois Ormanthe, mais je pense qu’il l’a ensorcelée. Je ne sçay, quant à moy, quel goust il y trouve, car, encore qu’elle soit ma niece, je diray bien qu’il n’y a pas une