Aller au contenu

Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/427

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

luy, vous le verrez incontinent revenir à son devoir, et vous crier mercy de sa faute. Vous croirez bien, ma maistresse, que si je ne vous aymois, je ne vous tiendrois pas ce langage. Aussi vous donné-je le mesme conseil, qu’en semblable accident, je voudrois prendre pour moy.

La conclusion fut que ceste fine et malicieuse se sceut tellement desguiser, que je luy promis, apres plusieurs remerciemens, de me servir de ce remede. Or le dessein qu’elle avoit, estoit defaire l’un de ces deux effets. Ou Damon (disoit-elle en elle-mesme), glorieux de son naturel, se voyant desdaigner avec plus de despit que d’amour, se retirera offencé des actions de Madonte ; ou bien, aiant plus d’amour que de despit, essaiera de regagner ses bonnes graces, s’esloignant d’Ormanthe. Si le premier avient, j’auray obtenu ce que je veux ; si c’est le dernier, j’acquerra ; une si grande creance aupres de Madonte, lors qu’elle aura éprouvé mon conseil estre si bon, qu’apres j’en disposeray entierement à ma volonté.

Et il advint que Damon connoissant quelque froideur en moy, et n’en pouvant accuser autre chose que les caresses qu’Ormanthe luy faisoit, se retira peu à peu d’elle, et la fuyoit comme s’il eust esté fille, et elle homme. Leriane s’en prit garde aussi bien que moy, et pour ne perdre une si bonne occasion, un jour que nous en parlions seules