Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/439

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promener ; et ayant remarqué qu’il y estoit à l’heure mesme, feignant de parler bas, elle tint assez haut tels propos à Tersandre : Afin que vous cognoissiez, mon frere, que Madonte vous ayme veritablement et qu’elle se moque de tous les autres qui ont opinion d’estre aymez d’elle, hier elle me commanda, dés qu’elle fut revenue de la chasse, de vous donner ceste bague qu’elle a fait faire expres pour vous, toute semblable à celle que vous luy avez veu porter il y a long temps, et vous prie de l’aymer, et de la porter pour l’amour d’elle pour symbole de vostre amitié, et pour asseurance que desormais sa volonté ne differera non plus de la vost ;e, que cette bague de celle qu’elle retient.

O dieux ! quelle trahison ! Est-il possible qu’un esprit humain en ait esté l’inventeur  ? Car il estoit certain que j’avois une bague semblable à celle qu’elle luy donnoit, et qu’il y avoit long temps que je la portois, et cette malicieuse l’avoit fait secrettement contrefaire avec dessein d’en commettre cette meschanceté.

Damon qui estoit, comme je vous ay dit, accoudé sur la fenestre haute, oyant la voix de cette femme, la recognut incontinent, et prestant plus attentivement l’oreille, ouyt les parolles que je viens de vous dire. Et parce qu’à dessein elle sortit le bras hors de la fenestre pour faire voir la bague à Damon, il recognut bien qu’il estoit vray que