Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/440

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j’en avois une semblable ; et cependant qu’il taschoit de la bien recognoistre, il ouyt que Tersandre luy respondoit : Je jure par tous nos dieux que cette faveur m’est tant agreable, que je veux bien que Madonte ne m’aime jamais, si je ne l’emporte dans mon cercueil pour marque que je suis à elle, et que c’est la plus chere chose que j’auray jamais. Et à ce mot il la prit, là baisa diverses fois, et en fin se la mit au doigt.

Si Damon fut transporté, et s’il avoit sujet de sortir hors des limites du devoir, je vous le laisse à penser, sage bergere. Et toutesfois il eust tant de pouvoir sur sa cholere, qu’il ne fit ny ne dit chose qui peut en donner cognoissance, de peur que quelqu’un ne s’en apperceust, et ne l’empeschast d’executer son dessein. En mesme temps la royne s’en alloit au temple pour assister aux sacrifices qui se faisoient presque tous les matins. Et parce que la femme de Leontidas ne l’abandonnoit guere, je la suivis, comme les autres dames de la Cour ; dequoy Damon n’estant adverty que nous ne fussions desjà en nos chariots, il monta à cheval et nous attaignit lors que nous entrions dans le temple.

Voyez quel malheur fut le nostre ! J’avois resolu de recevoir ses excuses, et de l’asseurer que je l’aymois, quelque demonstration que j’eusse faite du contraire, et pour tesmoignage de mes paroles je voulois