Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/466

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me cherche sans faire bruit et en fin me trouve en mon cabinet. Elle les appelle, et sans que j’y prisse garde me montre par le trou de la serrure. J’estoit pour lors couchée de mon long sur un petit lict, et avois la main sous la teste, resvant au miserable accident de Damon, et à la reputation qui m’en estoit demeurée, de sorte qu’a mon visage en pouvoit reconnoistre les tristes representations de ma pensée. Ceste meschante leur fit croire que c’estoit de mal et de lassitude que je demeurois de ceste sorte ; ce qu’ils creurent aisement pour les apparences qu’ils en avoient veues. Et trompez de ceste sorte, s’en retournerent faire leur rapport.

Cependant Leriane estant demeurée seule avec la sage femme, fit changer les linceuls de mon lict, et tout ce qui me pouvoit donner connaissance de ce qui s’y estoit passée, et contentant fort bien ceste bonne femmel, la licentia, apres l’avoir conjurée de n’en parler point, mais de bien remarque le jour et l’heure, afin qu’en temps et lieu elle s’en peut ressouvenir, et apres elles partirent de mon logis. Ma nourrice y revint quelque temps apres ayant tousjours esté retenue par la femme de Leontidas, et ne trouvant rien de changé dans ma chambre, ne s’estonna d’autre chose que de ne voir point Ormanthe dans mon lict, mais pensant qu’elle eust eu quelque affaire, elle n’en fit plus grande